MASSACRE AUX SIX PICS
ou « Tuerie aux six pinacles »
2519 CI
LA Emp. V8 p.17, Tempête de magie p.16-19
Cette bataille est écrite pour se jouer avec le supplément Tempête de magie. Les six pics sont des piliers de pouvoirs (cf. TdM p.28).

« Lorsque l'orbe vert brillera dans le ciel nocturne et que les vents hurleront, alors il sera temps de s’emparer de ce qui fut promis autrefois… »
La Prophétie des Six Pics

Les habitants du Talabecland ont depuis longtemps appris à se méfier des bois qui entourent les Six Pics et les évitent religieusement. Les sentiers forestiers qui y conduisaient ont donc été volontairement laissés à l'abandon et les chasseurs savent jusqu’où ils peuvent poursuivre leurs proies. Cela dit, ta plupart des animaux, eux non plus, ne franchissent pas ces limites et seule une bête acculée ou blessée osera fuir dans leurs directions. Le message transmis par les superstitions et les histoires pour faire peur aux enfants est sans équivoque. Les bois sont peuplés de dangers, et ce ne sont pas juste des fables.

Au cœur d’une vallée peuplée de prédateurs monstrueux profondément enfouie dans la Grande Forêt se trouvait une grande clairière cachée par d’épais bosquets d'arbres noueux. Pour s’y rendre, il n’existait pas de chemin, il fallait donc tailler sa route à travers un sous-bois infesté de ronces acérées, où la végétation repoussait si rapidement qu’elle pouvait faire disparaître le passage d'une armée entière en une seule nuit. Un voyageur persévérant serait cependant parvenu jusqu’à une vaste étendue entourée par les Six Pics, qui, selon la légende, étaient des fragments de Morrslieb. Chaque pic était un bloc de roche météorique noire, et l’ensemble faisait penser aux crocs d’une gueule béante, ou encore à de gigantesques pointes de lance. Une vapeur verdâtre émanait de leur surface rugueuse. Elle semblait absorber la lumière au lieu de la refléter, à tel point que la silhouette des Six Pics se détachait en plein jour de manière dérangeante.
Ce site était sacré pour les hommes-bêtes de la Grande Forêt, qui y célébraient leurs rituels impies. Lorsqu’à la pleine lune, Morrslieb illuminait les colonnes d’obsidienne, celles-ci murmuraient de sombres secrets aux chamans. D’après leurs croyances, quand la terre aux pieds des monolithes aurait été imbibée avec assez de sang, les Six Pics feraient don d’un immense pouvoir aux véritables enfants du Chaos. Ainsi, de nombreuses hardes empilaient les têtes de leurs ennemis au pied de chaque pic, mais rien ne leur fut accordé en retour, du moins, jusqu’à la venue des hommes-rats…

LE TRIBUT DU SANG

Les skavens convoitaient depuis longtemps les Six Pics, et guettaient le meilleur moment pour les dérober. Ils savaient qu’en agissant promptement, ils pourraient voler les blocs météoriques et effacer toute trace de leur action avant le retour des hommes-bêtes, car au cours leurs migrations, ils laissaient régulièrement le site sans surveillance durant plusieurs cycles lunaires. Toutefois, à la demande pressante de ses chamans, le Seigneur Brrak Corne-Rouge revint inopinément aux Six Pics. Se frayant un chemin à travers les ronces, la harde arriva juste à temps pour voir les rocs couverts de cordages et une multitude d’hommes-rats s'affairant à les guider jusque dans leurs tunnels. Rendu fou de rage par la violation du site sacré, Brrak sonna la charge, et il s’ensuivit une vraie boucherie.
Abasourdis par la fulgurance de l'attaque, les skavens ne purent même pas s'enfuir dans leurs tunnels car ceux-ci étaient obstrués par.le matériel nécessaire au transport des blocs d'obsidienne. Ainsi les hommes-bêtes les massacrèrent-ils par milliers, allant jusqu'à les poursuivre dans les goulets souterrains pour les tailler en pièces. Morrslieb, qui était à peine visible la nuit précédente, apparut alors dans toute sa gloire, teintant d'une lumière verdâtre le carnage qui sévissait. Sensibles à ce changement soudain, les chamans ordonnèrent que des offrandes soient faites sans plus tarder, et des piles de cadavres furent entassées au pied des Six Pics. Ainsi débuta une sinistre cérémonie qui dura trois nuits et trois jours. La quantité de sang appliquée à leur surface était telle que les blocs de pierre produisirent un voile noir, qui, poussé par les vents, recouvra toute la Grande Forêt d'une brume funeste.

L’ATTRACTION DE LA TEMPÊTE

Loin de là, dans les villages du Talabecland bordant les bois, la population perçut les signes d'une catastrophe imminente. Le lait se changeait en sang, des images bestiales apparaissaient dans les feux de cheminées et des nuages aux formes torturées se propageaient depuis "le lieu sombre", une partie notoirement sauvage de la Grande Forêt Des avertissements griffonnés à la hâte avaient déjà été envoyés par le Collège Céleste, car le Grand Astrolabe avait révélé de sombres présages au Grand Astromancien. Des pigeons mécaniques et des coursiers avaient été pressés pour répandre la nouvelle, et Kurt Helborg, le Reiksmarshall, leva promptement une armée pour faire face à la menace. À chaque village ou hameau qu'il traversait, le capitaine de la Reiksguard voyait sa force grandir d'un régiment de hallebardiers ou d'une milice, et même des chasseurs vinrent prêter main-forte à l'armée impériale, qui comprenait déjà des pièces d'artillerie tractées par des chevaux, le tank à vapeur Conquérant et maints régiments de troupes régulières. Ce contingent était accompagné de représentants de chacun des huit Collèges de Magie, bien qu'il n'y ait rapidement plus eu besoin de divination ou de lecture des astrolabes pour localiser la cause de cette mobilisation. En effet, depuis la forêt s'étirait jusqu’aux cieux une colonne effrayante de nuages noirs dont les tentacules de vapeur semblaient vivants. Après trois jours de marche, les troupes de l'Empire s'apprêtèrent enfin à pénétrer dans le brouillard dense qui noyait à présent les Six Pics.
Les hommes-bêtes avaient festoyé durant ces trois jours, et les vents avaient porté au loin les hurlements de leur orgie sanguinaire, réveillant ainsi de nombreuses créatures de cauchemar. Les cieux surplombant les Six Pics se déchiraient à présent pour révéler un trou noir grandissant qui occultait toute la voûte céleste. Presque aveugles au monde matériel, des cygors ressentirent néanmoins l’afflux magique en provenance du site d'obsidienne et ces mastodontes s'en servirent de balise pour rejoindre la foule bestiale qui se pressait là-bas. En outre, comme le sang appâte les requins, l'énergie arcanique croissante attira à elle des trolls, des jabberslythes et des araignées géantes.
Davantage d'hommes-bêtes et de créatures maudites de la forêt répondirent à l'appel des Six Pics, et bientôt les chamans grimpèrent au sommet de chacun des blocs de roche noire, du haut desquels ils purent s'immerger dans le flot massif de puissance émanant de la tempête. De là, ils perçurent  'approche de l'armée humaine et plus encore, ils sentirent qu’en restant sur leurs perchoirs, la chape funeste s'étendrait encore. Les vents de magie leur murmurèrent la promesse des dieux sombres d'un retour aux Temps de la Bête, où les humains ne vivaient pas dans des villes, mais se terraient dans des grottes sans oser bâtir ou même déboiser, tandis que les hommes-bêtes dominaient le monde. Ils hurlèrent et frappèrent le sol de leurs sabots, trépignant en anticipation du combat à venir et dans l’espoir d'obtenir ce qui leur revenait de droit : régner en maître lors d'un nouvel âge de ténèbres.

S'EMPARER DES MONOLITHES

Tandis que ses forces se frayaient un passage à travers le sous-bois, Kurt Helborg, général victorieux de maintes guerres, scruta le champ de bataille. Les hommes-bêtes s'étaient massés dans la clairière, et derrière leurs rangs innombrables se dressait un cercle de sinistres tours rocheuses dont la silhouette était si affreuse qu'il ne pouvait fixer son regard dessus. Au sommet de chacun des six monolithes, nimbé dans des flammes éthériques, se tenait un chaman bestial, et le Reiksmarshall n'eut pas besoin du conseil de ses sorciers de bataille pour comprendre l'origine de la tempête surnaturelle. Tandis que se formait la ligne de front impériale, ses ordres résonnèrent dans un silence angoissant. Il fallait à tout prix détruire les pierres et les chamans. Alors débuta le Massacre aux Six Pics, lorsqu’une batterie de grands canons cracha ses boulets en direction des blocs rocheux dans l'espoir de les pulvériser. Malgré la pénombre, certains projectiles auraient dû frapper la pierre, mais au lieu de cela, ils disparurent dans un éclair lumineux juste avant de toucher au but. Les prières à Sigmar, à Taal et à tous les autres dieux connus accompagnèrent bientôt les coups de feu. Une magie puissante était à l’œuvre en ce lieu, et Kurt Helborg comprit qu’il faudrait atteindre les monolithes pour espérer triompher.
En réponse au tonnerre de l'artillerie, les hardes d'hommes-bêtes se ruèrent à l'assaut en rugissant. Les soldats de l'Empire comptaient de nombreux vétérans ayant déjà combattu ces êtres bestiaux dans la forêt lugubre, mais aucun ne les avait vus rassemblés ainsi, sans parler de la folie sanguinaire qui les habitait ce jour-là. En outre, des créatures ignobles marchaient entre leurs rangs, comme les ghorgons, dont les bouches bavaient en prévision du festin à venir, les enfants du Chaos produisant de nouveaux tentacules à mesure qu'ils progressaient, et bien sùr les minotaures, ces montagnes de muscles à tête bovine, qui humaient l'odeur de leurs proies. En outre, une créature de cauchemar appelée grande bête épineuse, rarement vue en dehors des Désolations du Chaos, hurlait son impatience de se jeter dans la mêlée. Les vagues d'assaut furent particulièrement brutales, certaines bêtes étant rendues insensibles à la douleur par des sortilèges impies. Inlassablement, les monstrueux hommes-bêtes et leurs alliés percutèrent les lignes impériales, qui les repoussèrent à chaque fois aux prix de terribles pertes. Néanmoins, ces assauts incessants prélevaient un si lourd tribut que les effectifs impériaux commençaient à manquer.

UNE PERCÉE AUDACIEUSE

Les sorciers impériaux s'échinaient à contrer les enchantements qui décuplaient la férocité de l'ennemi, mais les chamans disposaient d'une trop grande puissance. Puisant directement dans la tempête, ils ne se contentaient pas de soutenir leurs congénères, mais faisaient également pleuvoir des sorts immondes sur les lignes impériales, qui furent noyées sous des nuées d’insectes voraces. Nombreux furent également les soldats à s'écrouler au sol en se tordant de douleur tandis que leur corps mutait horriblement, et des éclairs d'énergie démoniaque frappèrent depuis le sommet des monolithes d'obsidienne, ébranlant le tank à vapeur ou réduisant en pièces les canons de Nuln chaque fois que les chamans déchaînaient leurs pouvoirs depuis leurs promontoires. Ce fut Gunther Peau d'Ours, un sorcier d'ambre, qui parvint à porter le fer à l'ennemi.
Au moyen d'un puissant enchantement, il se transforma en dragon, puis libéra un passage à travers la horde avec son souffle enflammé avant de s'élever dans les airs pour lancer une attaque sur le sommet du monolithe le plus proche. Les grandes mâchoires reptiliennes eurent tôt fait de broyer le chaman qui s'y trouvait, et lorsqu'un nouvel éclair illumina le champ de bataille, la silhouette trapue du sorcier d'ambre se tenait sur le pilier de pouvoir. Toutefois, avant même de tirer parti de ce foyer de puissance, une énorme main le saisit. Les cris d'horreur de Gunther cessèrent lorsqu'il fut déchiqueté puis englouti par la gueule d'un cygor.
Pendant que les sorciers humains luttaient pour mettre un terme au bombardement magique, le Reiksmarshall se démenait afin d'éviter un désastre. Par une contre-charge intrépide, ses chevaliers offrirent assez de répit aux arquebusiers pour qu'ils puissent recharger leurs armes et les diriger contre la horde bestiale une fois de plus. Toutefois, Ils n'eurent pas le temps d'abattre deux ghorgons qui, après avoir occis un régiment de hallebardiers de leurs membres tranchants comme des lames, menacèrent d'enfoncer le flanc droit. Ces monstres y seraient parvenus s'ils ne s'étaient pas arrêtés pour enfourner plusieurs cadavres dans leurs multiples gueules, au milieu des cris atroces de soldats trop grièvement blessés pour s'enfuir. Appelant ses réserves, Kurt Helborg reformait une ligne.de front perpétuellement amoindrie, mais même avec l'apport de troupes fraîches, son armée ne pouvait que contenir les assauts, sans pouvoir atteindre les pics et les chamans.

DES RENFORTS VENUS DES CIEUX

Ce fut ce moment que choisit Balthasar Gelt, le Patriarche Suprême, pour survoler la bataille. Après avoir reçu les avertissements envoyés par les sorciers célestes, Balthasar avait soumis à sa volonté la quasi-totalité du Zoo Impérial, formant ainsi une escadrille de bêtes volantes pour venir en aide au Reiksmarshall. Monté sur un pégase, il décrivit des cercles dans le ciel à la tête d'une vaste ménagerie composée de plusieurs griffons, d'un vol de pégases, d'une manticore, ainsi que de la fierté de l’Empire, le Dragon Impérial d' Altdorf. Projetant sa vision au-delà de la noirceur surnaturelle, Balthasar réalisa qu'il ne pourrait défaire les forces engagées contre l'armée impériale, car celles-ci étaient trop nombreuses. S'il voulait faire la différence, il lui faudrait s'attaquer directement aux chamans juchés sur les Six Pics. D'un ordre mental, il fit plonger ses monstres.
Plusieurs d'entre eux furent foudroyés par des rafales d'énergie et s'écrasèrent au sol, mais les autres se jetèrent sur les chamans et les précipitèrent au bas des monolithes. Balthasar lui-même changea l'un des sorciers bestiaux en or avant de prendre sa place au sommet de l'un des pics d'obsidienne. Instantanément, le Patriarche Suprême se sentit parcouru d'une quantité folle d'énergie magique et sans plus attendre, il lança un puissant sortilège sur les hommes-bêtes alentour. Un orbe doré géant jaillit de son sceptre, grandissant à mesure qu’il roulait sur les rangs ennemis, et laissa un sillage de statues luisantes, des créatures du Chaos figées à jamais avec une expression d'agonie sur leur visage bestial. Les acclamations des troupes de l'Empire résonnèrent à travers toute la plaine.
Soudainement libérés de leurs duels mentaux contre les chamans, plusieurs sorciers se téléportèrent au sommet des monolithes à présent inoccupés, et les boules de feu fusèrent aussitôt sur les hommes-bêtes tandis que d'autres étaient consumés par la lave qui jaillissait sous leurs sabots. Plus loin, des monticules en lévitation s'abattaient sur les ghorgons pour les enterrer vivants. Paniquées par la déferlante magique qui les accablait à présent, les créatures bestiales s'enfuirent en direction de la forêt, mais aucune ne put se soustraire à la colère vengeresse des sorciers.
De sa position dominante, Balthasar pouvait voir une faille dans les cieux qui s'élargissait, et entendre le murmure de sombres secrets portés par les vents de magie. Aussi ordonna-t-il la destruction des Six Pics dès qu'il fut certain qu'aucun ennemi n'avait survécu. Invulnérables à la magie et même aux impacts répétés des boulets de canon, les tours noires furent enfin mises à bas par l'expertise des ingénieurs et la force musculaire de centaines de soldats. Les monolithes furent ensuite enterrés profondément et scellés par de puissants enchantements avant que les troupes impériales ne quittent la clairière. Tandis qu'elles regagnaient péniblement la route menant hors de la forêt, les volutes de fumée du bûcher funéraire se répandaient dans les airs. Naturellement, rien de tout cela n'avait échappé aux skavens. Bientôt, pensaient-ils, il serait temps de travailler à briser les sceaux de protection. Les blocs tant convoités, et le pouvoir qu'ils renfermaient, seraient alors à eux.